Illustration originale d'une scène imaginaire : un tutoriel de Bryan Beus

Par Bryan Beus

Site Web : www.bryanbeus.com

Ce tutoriel est une vue d'ensemble des étapes que j'ai suivies pour réaliser un projet personnel baptisé Faerietank (Aquarium de fées).

La première partie traite les aspects généraux de la peinture, en particulier l'idée maîtresse, l'interaction avec votre public, la création de vignettes, de dessins, d'études et autres éléments.

La deuxième partie porte sur le processus de création dans Corel Painter, à savoir le choix des outils, des brosses et des autres ressources servant à la réalisation de l'œuvre finale.

En guise de conclusion, la dernière partie montre étape par étape un processus unique à Corel Painter X3, à savoir l'utilisation de l'outil Perspective.

Commençons.

Cette partie n'est pas si technique... mais très importante.

Quand j'ai commencé cette peinture, j'étais en train de terminer un projet d'écriture créative, long et dévorant, au cours duquel j'avais rempli quelques carnets de concepts que je n'ai jamais eu le temps d'expérimenter.

Cela m'a semblé une idée amusante que de faire participer mes lecteurs à la relance de mes projets artistiques, donc j'ai posté quelques concepts dans mon blog où tout le monde pouvait voter pour celui qu'ils aimeraient voir réaliser. Voici la liste des concepts à l'origine :

Tout d'abord, je tiens à souligner que je ne me soucie vraiment pas de savoir à quel point les concepts sont évocateurs. A ce stade, ce ne sont que des croquis. Ce qui m'intéresse le plus, c'est de trouver une histoire que je veux vraiment raconter; les beaux coups de pinceau viendront plus tard.

À y penser maintenant, je ne suis pas surpris de voir à quel point mes lecteurs sont perspicaces. C'est-à-dire que tous ceux qui ont laissé des commentaires avaient des choses intéressantes à dire quant aux raisons qui les ont poussés à voter pour tel ou tel concept.

En fin de compte, et par une marge étroite, tout le monde a choisi celui qui se trouve dans le coin supérieur droit, à savoir l'aquarium de fées.

De là, je n'avais vraiment pas de processus prêt à l'emploi. Chaque peinture revêt au départ un peu un mystère. J'ai joué un peu avec quelques croquis et dessins, puis j'ai décidé que si j'allais peindre un aquarium, je devais savoir de quoi avait l'air un très bon aquarium.

Alors, je suis parti à Aquarium.

C'était vraiment un grand plaisir que de passer un après-midi à regarder les poissons, et j'aime toujours me voir interrompre par les petits enfants (« Dessine-moi ! Dessine-moi ! »). Je suis resté là jusqu'à ce que le gérant m'a demandé de partir (j'en ai vraiment eu pour mon argent, 7 $ !), et quand je suis rentré, j'étais enfin prêt à commencer à développer les concepts.

Je voulais toujours tenir mon public dans le coup. Dès lors, une fois avoir ébauché une miniature, j'ai dessiné un ensemble de fées potentiels afin que mes lecteur puissent voter pour leur favori.

Je ne passe pas toujours autant de temps à dessiner chaque sujet au complet; à ce stade, la peinture garde souvent son caractère un peu plus spontané. Mais, lorsqu'on invite un public à décider des suites à donner à un tableau — qu'il s'agisse des lecteurs de blog, d'un directeur artistique ou de tout autre client —, vous voulez toujours vous assurer qu'ils ont bien compris ce que vous tentez de dire au travers de votre dessin. Car, si votre collaborateur s'y perd, il va soit se désintéresser de votre projet, soit vous donner des conseils peu judicieux, ce qui n'est pas souhaitable dans un cas comme dans l'autre.

Je n'ai donc laissé rien au hasard avec les lecteurs de mon blog et, une fois encore, ils m'ont présenté des idées géniales, une corne d'abondance.

À ce stade, au stade conceptuel, il ne restait qu'un seul problème; c'était l'éclairage (vous le verrez dans un instant pourquoi je m'en suis occupé de prime abord).

Une fois de plus, je ne cherche vraiment pas pour le moment à impressionner qui que ce soit par la qualité de mes coups de pinceau. Tout ce que je cherche à savoir, c'est où sont les sources de lumière, le niveau de luminosité, si la lumière est directe, ambiante ou diffuse, et le comportement général.

Une fois que j'ai une bonne idée de l'éclairage, il est temps de commencer à traduire ce projet dans la réalité des faits !

Si vous voulez faire une peinture réaliste de quelque chose que vous n'avez jamais vu pour vrai (comme un aquarium plein de fées), vous devez vous faire une idée de ce à quoi il ressemblerait vraiment.

Voici, à titre d'illustration, une vidéo de mon processus de création de documents de référence picturale :


Faerietank - Rassembler des éléments de référence - HD de Bryan Beus sur Vimeo

Vous pouvez voir pourquoi j'ai fait au départ une étude de valeurs approximative : elle me permet de configurer correctement mes modèles.

On me demande toujours : « Que faites-vous pour trouver des modèles ? La réponse : des amis. La plupart des artistes que je connais procèdent ainsi. Pour récompenser mes amis qui me servent de modèles, je leur donne une copie du tableau quand tout est fini. Parfois, je demande simplement à des gens je rencontre au hasard. Immanquablement, ils finissent par devenir des amis, c'est donc un plus.

J'avais également besoin de savoir comment la lumière se comportait dans un aquarium. Comme vous pouvez le voir, l'eau et les petites bulles d'air partout font que la lumière se diffuse doucement à travers les plantes.

Quand vous avez une bonne idée de la traduction concrète du concept, tout est facile à partir de ce stade, parce que tout ce que vous faites vraiment, c'est appliquer des techniques de dessin et de peinture, des techniques de base que n'importe qui peut vous enseigner.

À l'aide d'un simple crayon mécanique de 2 mm, j'ai créé mon dessin final. Comme il était trop grand pour être scanné, je l'ai donc coupé soigneusement en trois morceaux, puis l'ai remonté numériquement.

(Corel Painter est l'un des principaux outils qui ont rendu la tâche si facile à partir de ce stade. Je m'en sers presque exclusivement.)

Parlons configuration technique

Mon matériel :

  • Macbook Pro 17 po
  • Système d’exploitation : OSX Mountain Lion
  • Scanner à plat
  • Corel Painter
  • Tablette Wacom Intuos5 - Moyen

Jusqu'ici, pour ce qui est du pixel, on a surtout travaillé à n'importe quelle taille qu'on aimait mais, à partir de maintenant, on va travailler à une taille aussi grande que gérable. L'objectif, c'est d'avoir un tableau qu'on peut imprimer à quatre pieds de largeur, sans pixellisation notable; on va donc faire 6326 x 3558 px, ce qui est assez grand.

Pour garder mon dessin original comme référence, à mesure qu'on travaille, on va opérer la séquence suivante : Sélection > Tout sélectionner, Édition > Copier, Édition > Coller.

Puis, dans la fenêtre Plans de l'espace de travail, il faudra cliquer sur le bouton en forme de cadenas pour éviter d'y dessiner accidentellement.

Ensuite, dans le menu déroulant du plan, on change le type de « défaut » à « gélatine ».

Maintenant, cliquons à nouveau sur le calque de zone de travail. Essayez-le et vous verrez que vous pouvez peindre sur la toile autant que vous le souhaitez et que les lignes de votre dessin resteront toujours visibles.

Passons à la lumière et cherchons à nous faire une meilleure idée de son comportement dans la peinture.

Pour commencer, on va appliquer de la lumière à toute l'image en cliquant sur Effets > Surface > Éclairage.

Nous allons varier les lumières, les positionner ici et là sur ​​la toile, c'est-à-dire la zone de travail, de manière à reproduire les effets d'éclairage dans un aquarium. Mais, il ne faut pas en faire trop pour se laisser une marge de manœuvre dans la gamme des valeurs élevées.

Nous voilà bien partis ! Pour le moment, on ne se soucie pas de texture, on veut vraiment et simplement donner le ton.

Alors, on va utiliser un bon vieux aérographe numérique aux bords adoucis.

Il faut garder la brosse aussi large que possible pour ne pas se laisser prendre dans le souci des détails.

À mesure que la peinture progresse, on peut en arriver à vouloir que le climat soit plutôt embué et, donc, égayer les ombres par rapport à ce qu'elles étaient dans l'étude de valeur initiale.

Une fois avoir défini les valeurs, on va passer à la combinaison initiale de couleurs.

À ce stade du travail, on est encore à penser que la fée au centre est la figure centrale du tableau. Ainsi, après avoir expérimenté pendant un certain temps, on peint sa robe d'une couleur rose saumon, puis, étale du vert et du jaune dans le reste de la peinture, avec une touche de rouge pour imiter le saumon de la robe de la fée principale.

C'est chose faite... mais c'est très terne en termes de saturation. C'est donc le moment idéal de commencer à ajouter un peu de texture.

Pour commencer, on va appliquer à la toile, dans son ensemble, un léger soupçon de texture en cliquant sur Effets > Surface > Texture.

On va simplement utiliser le papier texturé par défaut que propose le logiciel. De toute façon, à la fin, il n'en restera rien; tout sera couvert.

Aussi, on va travailler avec la variante Jet léger de la catégorie Aérographe à mesure qu'on ajoute de la couleur.

Du moins pour un moment, on ne va pas se soucier des détails. Nous allons seulement garder la brosse aussi grande que possible, en passant d'un endroit à l'autre, et mettre la scène en évidence.

Maintenant que la peinture a pris un certain élan, on va enfin faire ressortir de la texture. J'aime tous les pinceaux prédéfinis que propose Painter et les utilise souvent, mais rarement sans les modifier quelque peu.

L'outil Éponge est l'un de mes favoris. Techniquement, il est censé mélanger et brouiller la peinture de manière tachetée (comme le font les éponges sur une toile à l'atelier), mais on va quelque chose d'autre en modifiant la re-saturation et en variant ici et là les valeurs de mélange.

Maintenant, comme vous pouvez le voir, l'éponge donne à l'arrière-plan une texture merveilleuse, subtile et rugueuse, à mesure qu'on applique des couleurs un peu plus claires et en plus sombres.

Suivant le même rythme, le château est le premier élément qu'on va travailler en détail.

Ici, nous utilisons en combinaison quelques pinceaux, notamment le pinceau Pastel gras, parce qu'il va nous donner un peu de grain, sans que les traits soient grossiers.

(Pour les papiers, j'ai utilisé ici de nombreux designs personnalisés.)

Le couteau à palette, défini à dessein, figure aussi parmi mes pinceaux préférés. Normalement, dans sa configuration par défaut, il fait beaucoup de bavures, mais on va en modifier le rendu de sorte qu'il peut peindre.

Voici les paramètres à utiliser :

Essayez d'en faire l'expérience. Sa pointe dynamique agrémente le plaisir du travail du pinceau.

En bien, avec le pinceau Pastel gras, l'aérographe Jet léger, l'outil Éponge et le couteau à palette, on a un bel ensemble de moyens propres à créer une grande variété de traits les mieux harmonisés.

Il est temps de hausser le ton.

En travaillant, il faudra s'assurer que les lumières et les ombres sont là où elles devraient être — nous avons déjà réglé ces problèmes dès au stade de la photo de référence.

Eh bien, un mot sur la couleur. Jusqu'ici, on a procédé à vue, par instinct, au fur et à mesure, en se fondant sur notre expérience de peinture d'autres sujets réels.

On peut également profiter d'un livre audio à mesure que le processus devient plus facile. J'écoute en ce moment « Watership Down » et « Surprised by Joy ».

On passe ici et là du tableau, travaillant le toit chatoyant (en veillant à ce qu'il brille), puis descend passant par la porte, la gazon et les chutes d'eau, vers le bas.

Chemin faisant, on décide que la fée flamboyante qui nage dans le château, tête première, ne convient vraiment pas, et on l'efface simplement.

Aussi, vous avez sans doute remarqué que la peinture est inversée horizontalement. Il s'agit d'une ancienne technique de peinture qui permet à l'esprit de l'artiste de « se réinitialiser » pour ainsi dire, afin qu'il puisse voir la peinture d'un œil neuf.

On arrive en fin de compte à la fée dans le coin inférieur. Elle est difficile à peindre, vu que le concept original en fait la fée ventouse qui va nettoyer le verre tout autour.

On ne peut vraiment lui faire grand chose, sauf à y revenir encore et encore jusqu'à ce qu'on réussisse à lui donner un beau passable; on y reviendra probablement plus tard pour la peaufiner.

Maintenant, il est temps d'ajouter un peu de feuillage et, à ce propos, il faut simplement s'y donner à cœur joie parce que, loin de nous plier de quelle que manière que ce soit à la photo de référence, on va s'en servir uniquement comme principe directeur pour se rappeler comment la lumière interagit avec les feuilles et les autres éléments avoisinants.

En travaillant le feuillage en bas, de ce côté-ci, on estime qu'on pourrait tout aussi bien remonter pour travailler le feuillage à l'arrière aussi. Passant à l'autre côté, on y reproduit le même comportement du feuillage qui redescend pour rejoindre les feuilles à la base.

On peint également le feuillage de fond derrière la petite montagne. Chemin faisant, on trouve que la fée qui ressemble à une tornade tourbillonnante est source de confusion, parce que sa longue robe fluide lui prive d'une silhouette reconnaissable. Elle a besoin de changer radicalement.

Il y a la fée au château, qu'on a vue plus tôt et dont l'emplacement ne nous plaisait pas, mais on a décidé d'attendre voir si elle trouvera sa place ici. En effet, quand elle peinte, elle a l'air de n'avoir rien à se reprocher ici.

Chemin faisant, on va essayer vaguement de voir de quoi aura l'air la fée jaune.

Maintenant que l'arrière-plan est bien terminé, il est temps de mettre au point l'avant-plan.

Il semble que les petites roches formant la base de la montagne seraient plus intéressantes si elles formaient plutôt une arche.

Tout étant presque terminé, il ne reste que la dernière fée, une fée à faire disparaître. Il s'agit de la fée centrale et on l'a laissée pour le moment parce que, même si elle nous plaît, son emplacement ne convient pas tout à fait.

Le problème, c'est son emplacement central en fait une figure dominante comme si elle était une déesse. Cela dévie du caractère fantaisiste de l'histoire, celle de l'Aquarium de fées (Faerietank) qu'on essaie de conter. Lorsqu'elle se trouve placée latéralement, le résultat est finalement l'effet recherché.

Pour la peindre, et vu qu'elle est une figure élégante et lisse, nous comptons beaucoup sur le couteau à palette. Elle est facile à peindre, puisqu'on a une bonne photo de référence et, avec juste un peu d'effort, c'est chose faite et on passe à la fée suivante.

Allons donc au fond.

Cette fée s'est mise sur le dos, à l'angle, et, de ce fait, il sera peut-être un peu plus difficile de peindre son visage. Que faire ? On va prendre des mesures précises ici, jusqu'à ce qu'elle s'intègre parfaitement dans le tableau. De fait, c'est l'une des raisons pour laquelle on travaille à une échelle plus grande.

Les bulles d'air constituent la touche finale. Pour les créer, on va utiliser une variante d'aérographe modifiée quelque peu. On va définir la pointe en forme d'anneau, puis configuré le pinceau comme le montrent les images ci-dessous.

Lorsqu'on peint avec cette brosse, elle donne un joli petit flot.

On peut presque entendre le bruit de la pompe à air du réservoir, rien qu'en regardant ces bulles, et c'est un bon signe qu'on est près de la fin.

Maintenant, on est à l'avant-dernière étape de la peinture.

Comme c'est toujours le cas, dès qu'on s'éloigne du tableau pendant un certain temps et y revient, on va le voir d'un œil neuf et découvrir des erreurs comme le fera aussi notre public.

Dans ce cas, zelda_geek sur conceptart.org m'a fait remarquer gentiment que j'ai fait une erreur de perspective.

C'est-à-dire que le réservoir, tel que les lignes le présentent en ce moment, donne l'impression que la surface de l'eau suit une pente ascendante vers la caméra.

Idéalement, il est préférable de faire les choses et les réussir,dès la première fois. Mais, s'il n'y pas d'erreur et qu'on a encore le temps, on y revient toujours y apporter des retouches utiles.

On ne laisse jamais traîner sciemment une erreur sur la toile.

L'erreur qui m'a été signalée est vraiment grave et il faudra plusieurs heures pour la corriger. Mais, c'est là que Corel Painter X3 fait de prouesses.

Jetons un coup d'œil sur l'outil de perspective :


(Ici, j'ai grisé tous les autres boutons d'outils afin que vous puissiez trouver plus facilement l'outil de perspective).

Avec la présélection Horizon standard en 1 point, jetons un coup d'œil dans les barres de maintien de l'aquarium.

La ligne d'horizon est à peu près au même niveau que la roche blanche sur la petite montagne.

Pour les besoins de ce tutoriel, je vais ajouter quelques grandes lignes épaisses à l'endroit où les éléments auraient dû être afin que nous puissions les voir un peu mieux.

Passons maintenant au château avec la présélection standard Composition générale en 2 points.

Cet outil de perspective à deux points me permet de bien tracer des lignes indiquant là où les bords du château devraient être.

Voici au final la grille de perspective corrigée :

Avec un peu d'effort de copier-coller et de mise à l'échelle, on a bien ajusté à peu près l'aquarium.

Et maintenant , il ne nous reste qu'à revenir repeindre tous les bords pour mieux les harmoniser à nouveau. Comme on l'a déjà fait une fois et maîtrise tous les problèmes inhérents, ce n'est pas trop difficile.

Ou selon les circonstances

Et ... voilà : un aquarium plein de fées ou « Faerietank ». Il faudra l'imprimer, le raccrocher au mur, puis se féliciter en vidant un pot de crème glacée avec du lait et une demi-boîte de biscuits Graham, un mélange parfait !

Merci de votre attention !

Au plaisir de vous lire bientôt sur mon blog : www.bryanbeus.com.